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Paradis, enfer, purgatoire... des réponses claires.

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mercredi 3 novembre 2021

            Aujourd'hui nous fêtons saint Martin de Porrès, qui est certainement peu connu en France, mais très connu au Pérou. Fils d'un caballero espagnol et d'une esclave noire, bien que reconnu par son père, il sera toute sa vie considéré comme un citoyen de seconde zone, autant par l'étrangeté de ses origines que par sa couleur de peau. Confirmé par celui qui deviendra saint Toribio de Mogrovejo, le premier archevêque de Lima, il est, à douze ans, apprenti coiffeur et assistant dentiste. Il fait la connaissance d'un père Dominicain, qui l'invite à venir au monastère, parce qu'il a déjà une réputation de sainteté par la droiteur de sa vie. Il ne peut cependant pas devenir frère, à cause de la couleur de sa peau, selon la coutume de l'époque. Peu importe : il sera un "donné". Il n'a pas accès au choeur en tant qu'acteur de la liturgie mais il peut cependant vivre au monastère et y rendre des services. Deux ans plus tard, son père vient lui rendre visite et, après avoir parlé avec le provincial, il est convenu que Martin devienne frère coopérateur. Ça reste une sous-catégorie, mais il est admis cependant à faire sa profession religieuse, ce qui n'est pas rien. Devenu le portier de la maison, il est connu pour sa charité sans borne : il sert tout le monde, qu'il s'agisse de soldats espagnols, d'esclaves ou d'indiens, personne n'est banni de sa générosité, personne n'est jugé, tous sont traités avec la même bienveillance. Il héberge même les chats, les chiens et jusqu'aux souris, qu'il protège des appétits des félins. D'autre part, il a des dons pour soigner les malades, et il exerce ses talents tant envers ses frères dominicains que dans la rue. Il ne faudrait pas croire cependant qu'on lui en rend grâce : la plupart du temps, c'est sous les insultes, les moqueries et les humiliations qu'il rend service. De plus, la jalousie provoquée par sa renommée de sainteté lui cause souvent du tort. Mais lui, heureux d'aimer, ne s'offusque pas, ne se défend pas, ne se décourage jamais. Son supérieur finit par lui imposer de venir demander l'autorisation avant de faire des miracles, tant sa réputation fait de l'ombre aux autres frères, et Martin, toujours docile, ne manque pas de lui obéir. Quand il va faire les courses pour le monastère, il n'est pas rare qu'il distribue, sur le chemin du retour, tout ce qu'il avait acheté aux pauvres. On comprend bien qu'il devenait compliqué de lui confier même les tâches les plus simples, car toutes étaient soumises à l'impératif de la charité, et devenaient secondaire dès qu'on lui demandait quelque service que ce soit. Sentant sa mort venir, il demanda un jour aux frères de chanter le Credo, et il remit son âme à Dieu au cours de cette prière. 

            Saint Martin de Porrès forme, avec saint Toribio de Mogrovejo et sainte Rose de Lima, ce qu'on pourrait appeler la "trinité" des saints du Pérou. Ils ont tous vécu à la même époque, au début du 17ème siècle, passant leur vie à faire connaître, dans ce pays nouveau, la joie qu'il y a à servir Dieu et à être disciple du Christ. Par des miracles, une vie chaste et droite, de grands sacrifices et beaucoup de souffrances supportées avec patience et bonne humeur, ils ont répandu l'Évangile et la bonne nouvelle du salut dans tout le pays, au point que même les autorités Incas de l'époque demandaient le baptême comme une grâce qui leur serait faite. L'histoire de l'évangélisation de ce pays est bien différente de la "légende noire" inventée beaucoup plus tard. Elle se fonde sur des saints qui ont su, par leur humilité, leur amour de Dieu et des pauvres, et leur générosité sans limite, non pas imposer une religion nouvelle par la force à une population réticente, mais évangéliser avec amour et don de soi, donnant envie à tout un peuple de marcher, à leur suite, dans leurs pas du Christ.